Puis Mintzberg vint

Chers collègues,

Avant un bouquet de printemps cueilli en flânant le long du web, un grand merci à Frédéric Pierru, qui a attiré mon attention le dernier ouvrage du pape du management, et du management médical en particulier, Henry Mintzberg.

Au soir de sa prestigieuse carrière, l’universitaire canadien a publié en 2017 Managing the Myths of Health Care: Bridging the Separations between Care, Cure, Control, and Community. C’est un livre de première importance car il émane du meilleur connaisseur de la question et bat en brèche toute la pensée managériale technocratique dominante, y compris en France. Il affirme la nécessité d’un management médical spécifique non quantophrénique.

Ce livre doit être signalé de toute urgence à ceux qui réfléchissent à l’avenir de nos établissements hospitaliers, à l’Élysée, à Matignon, avenue de Ségur, et bien sûr avenue Victoria, même si Mintzberg explique qu’ils ne sont justement pas les plus aptes pour décider : « Much of the significant change in health care has to come initially from the ground up, not the top down, let alone from experts who have not practiced health care. […] Health care cannot function without management, but it can certainly function without a form of management that has become too common. I call it remote-control management because it is detached from the operations yet determined to control them. It works badly even in business, from where it has come. In health care, it reorganizes relentlessly, measures like mad, promotes a heroic form of leadership, favors competition where there is the need for cooperation, and pretends that this calling should be managed like a business. The more of all this we get, the more dysfunctional health care becomes. […] Most everywhere, the essential problem in health care may lie in forcing detached administrative solutions on to practices that require informed and nuanced judgments. »

Voici quelques passages parmi les plus significatifs :

« Maybe it’s all so simple, if we can just change our concept of the health care world: to reorganize our heads instead of our institutions, so that we can think differently about systems and strategies, sectors and scale, measurement and management, leadership and organization, competition and collaboration. »

– « This professional form of organizing is the source of health care’s great strength as well as its debilitating weakness. In its administration as in its operations, it categorizes whatever it can, in order to apply standardized practices whose results can be measured. When the categories fit, this works wonderfully well. The physician diagnoses appendicitis and operates; the government or insurance company ticks the appropriate box and pays. But what happens when the fit fails? For example, who cares for the patient who falls between the categories, say, with some form of autoimmune illness that medicine has yet to prototype? Or how about the patient who fits the category but is ignored as a person, and so does not respond adequately to the treatment? Even more damaging can be the misfit between managers and professionals, as they pass each other like ships in the night, the managers in their hierarchy of authority, the professionals in their hierarchy of status. »

– « Likewise, I question conventional ways of developing managers, MBA programs and the like included. Mostly they teach an analytical approach to a job that is primarily practiced as craft with art. Moreover, I am suspicious of measurement too, at least as a panacea, and I believe that strategic planning is an oxymoron: strategies have to be learned on the ground, not deemed in offices. »

– « Measurement can be fine, so long as it is used sensibly. But too often, in management and sometimes medicine as well, it is used mindlessly. Health care needs to become more effective by getting less efficient. »

– « Strategies cannot be planned formally because they are about attaining synthesis, not just doing analysis. And that requires flexible learning, not formal planning. »

– « Evidence has to be put in its place—namely, where it can aid judgment, not replace it. There are times when the evidence is so weak that professionals have to rely on judgment, based on experience. But never is the evidence so strong that they can afford to suspend judgment. »

– « Many successful leaders are not “transformational” or “charismatic” so much as healthy and engaged: they connect with and respect people, whom they see as colleagues, not “subordinates,” let alone a “workforce.” And so they cooperate naturally with them. I believe that the great organizations are robust communities of human beings, not generic collections of “human resources.” It is the collective efforts of these human beings that make its leadership appear to be great. »

 

Abécédaire de printemps

Addictions

La carte mondiale de la dépendance à l’alcool et aux autres substances sur le site Our World in Data.

Contrairement à une idée répandue, Mozart n’était pas alcoolique, si l’on en croit le chirurgien anglais Jonathan Noble, qui a consacré un ouvrage aux maladies attribuées aux compositeurs à travers le temps, That Jealous Demon, My Wretched Health. Disease, Death and Composers (voir ici).

Assurances

La généralisation de la complémentaire santé en entreprise profite… aux assurances, selon une étudede la DREES (voir ici).

Biais

L’excellent blog Etudes et biais signale la multiplication des études biaisées à attendre des données massives et des études de corrélations (voir ici). Si le raisonnement est biaisé, les quantités élevées de données ne changent rien à la donne.

L’auteur de ce blog, Alexis Clapin, publie aux éditions Désiris Enquêtes médicales & évaluation des médicaments. De l’erreur involontaire à l’art de la fraude(voir ici). Extrait : « Qu’un simple lecteur ne puisse pas déceler tous les biais n’est pas bien grave. Le réel problème est que ceux qui sont chargés d’évaluer les médicaments ne le peuvent pas non plus ».

Commémoration

Le National Health Servicefête ses soixante-dix ans le 5 juillet prochain (voir les dates marquantes de son histoire (ici).

Aujourd’hui, il n’est pas au mieux, faute de moyens principalement (voir ici). Des parlementaires britanniques de tous bords demandent un effort financiers important pour le sauver (voir ici). Extrait : « The IFS report, commissioned by the NHS Confederation, offers a robust and credible analysis of the pressure this will place on the NHS and care system, which is already stretched to the limit, and of the implications for public spending on these services. Its message is simple: if we want effective and safe services, we will have to find the resources to pay for them.

The report found that “a modernised NHS could require funding increases of 4% a year over the next 15 years”. That would mean health spending rising from 7.3% of national income today to 9.9% in 2033-34. For adult social care, spending is likely to have to rise by 3.9% annually over the same period.

It also offers another scenario, with modest increases in real-terms spending that will do little more than keep the show on the road – never mind deliver the higher standards of care we should expect from an institution that has long been the envy of the world. »

Délégation de gestion

Le centre hospitalier de Valenciennes est le seul en France où une très large délégation de gestion a été accordée aux chefs de pôle, selon « la voie des hôpitaux magnétiques et de l’innovation disruptive ». Fondé sur la confiance et la médicalisation du fonctionnement hospitalier, c’est un exemple à connaître, et sans doute à suivre pour toutes les raisons indiquées dans cet article, prix RH et Management 2018 de la Revue Hospitalière de France. Le directeur général du centre hospitalier de Valenciennes a délégué 90 % de ses prérogatives et a ainsi largement amélioré l’attractivité de l’établissement.

Ce mode de fonctionnement prendrait tout son sens si les chefs de département (utilisons ce terme plutôt que l’affreux pôle) n’étaient pas nommés selon le bon vouloir du directeur général et s’il se développait dans un environnement non soumis à la tarification à l’activité, aux business planset aux restrictions budgétaires.

Déstigmatisation

Une belle campagne de la Fondation Pierre Denikerpour aider à mieux comprendre la schizophrénie.

Le New York Timesrapporte qu’aux États-Unis l’espérance de vie des personnes atteintes de schizophrénie s’écarte de plus en plus de celle des autres, pour plusieurs raisons, dont une mauvaise prise en charge somatique.

Encyclopédie

L’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert enfin en libre accès sur internet, ici. (HOPITAL, s. m. (Gramm.​​Morale​​& Politiq.​​) ce mot ne signifioit autrefois qu’hôtellerie : les hôpitaux étoient des maisons publiques où les voyageurs étrangers recevoient les secours de l’hospitalité. Il n’y a plus de ces maisons ; ce sont aujourd’hui des lieux où des pauvres de toute espece se réfugient, & où ils sont bien ou mal pourvus des choses nécessaires aux besoins urgens de la vie.)

Enfer des règles

Christian Morel poursuit sa remarquable série sur les décisions absurdes (phénomène très répandu dans l’administration hospitalière, et même en croissance continue). Le troisième volume porte sur la prolifération des règles et leur danger (Les décisions absurdes, III. L’enfer des règles. Les pièges relationnels.Gallimard). Dans le compte rendu d’En attendant Nadeau, il est rappelé que la cause principale de cette prolifération repose sur « la croyance dans le tout prévisible ». Christian Morel définit une règle comme « toute publication contraignante […] dont le but est de réguler de façon impersonnelle les actions humaines ».Il préconise « des règles et procédures parcimonieuses et de qualité, une priorité donnée à la compétence augmentée et à des relations humaines »dont il définit les principes dans cet opuset dans son précédent ouvrage (Les décisions absurdes II. Comment les éviter. Gallimard,2012).

Enfumage

Comment les industriels du tabac ont influencé les travaux sur les dangers de la cigarette sur France Culture.

Dans le même genre, Purdue Pharma a mené des campagnes agressives en faveur de l’Oxycontin en ayant connaissance des risques d’abus et de dépendance liés à cet opiacé (voir ici).

Free market

La corrélation entre augmentation des dépenses de santé et amélioration de l’espérance de vie a décroché spécifiquement aux États-Unis à partir des années 1980. Les causes ? Absence de régulation et bureaucratie liée à la multiplicité des acteurs et la complexité du système (voir ici).

GAFAM

Comment améliorer la confidentialité sur internet en 15 mn (voir ici).

Grosse tête

The Atlantic assure que le développement du cerveau chez l’Homme est dû aux gènes NOTCH2NL, présents en un seul exemplaire chez les grands singes, en trois exemplaires, avec d’infimes variations, dans notre espèce.

Hervé Maisonneuve

Notre collègue lyonnais fait l’objet d’un portrait dans Le Monde. Son blogest inestimable. Il se bat notamment pour l’intégrité de la recherche. Les progrès sont lents, très lents, trop lents, mais réels.

Influence

L’inflation de publications à prétention « scientifique » produit surtout de l’ignorance, selon Ioannidis pour qui 85 % de ces publications sont fausses. Un chiffre plus désarmant encore : « Moins de deux articles scientifiques sur 10 000 conservent une influence dans leur domaine des décennies après leur publication, selon une analyse menée sur cinq millions d’articles parus entre 1980 et 1990. » (voir ici)

John P. A . Ioannidis

Que devient la normalité à l’heure de la médecine dite de précision et des données massives se demande John P. A. Ioannidis, avec Arjun K. Manrai et Chirag J. Patel dans le JAMA : « The definition of “normal” values for common laboratory tests often governs the diagnosis, treatment, and overall management of tested individuals. Some test results may depend on demographic traits of the tested population including age, race, and sex. Ideally, laboratory test results should be interpreted in reference to a population of “similar” “healthy” individuals. In many settings, however, it is unclear exactly who these individuals are. How much population stratification and what criteria for healthy individuals are optimal? In particular, with the evolution of medicine into fully personalized or “precision” medicine and the availability of large-scale data sets, there may be interest in trying to match each person to an increasingly granular normal reference population. Is this precision feasible to obtain in reliable ways and will it improve practice? »

King’s Fund

Une étude de cette association britannique indépendante compare les moyens de santé dont disposent les pays de l’Union européenne. La France est en dessous de la moyenne pour le nombre de médecins et d’infirmières par habitant, ainsi que pour la densité d’équipements de radiologie (tomodensitométrie et IRM), au-dessus pour les dépenses et le nombre de lits par habitant (tous les chiffres ici).

Une autre publication du King’s Fund affirme que les données massives de santé seraient biaisées si trop de patients réclament que leurs données restent confidentielles et ne soient pas utilisées pour la recherche. Extrait :« National policy has to keep a balance between responding to legitimate public concern about the security and confidentiality of data and enabling data to be shared and used by NHS organisations and third parties. It is also essential that NHS national bodies are transparent with the public about how patient data is used. NHS England and NHS Digital must ensure that opt-out levels are kept under review and put in place a long-term plan to promote the benefits of NHS organisations and third parties being able to access and use patient data. At the same time, NHS organisations must ensure they are beyond reproach in the way they use patient data. »

Lobby

Comment Bayer-Monsanto a-t-il obtenu avant les députés le texte d’un amendement allant contre ses intérêts ? C’est la question que pose Delphine Batho à la tribune de l’Assemblée nationale. Piratage ? Traîtrise ? Aucune réponse pour l’instant (voir ici).

Mortalité évitable

C’est un index assez robuste pour évaluer l’accès aux soins et leur qualité. Dans The Lancetdu 2 juin un classement mondial selon ce critère : la France se situe dans le haut du tableau, en 20eposition, derrière l’Allemagne et l’Espagne et devant la Slovénie. Les États-Unis sont 29e. Le vainqueur est l’Islande, devant la Norvège et les Pays-Bas.

Les décès par armes à feu ne sont pas pris en compte dans cette étude, bien qu’ils soient évitables par une législation restrictive sur les armes. Cette statistique de Our World in Dataest éloquente.

Narcissisme

Quelques réflexions personnelles sur l’avenir de l’hôpital.

Obligation

Pour qu’un système assurantiel en santé soit non prohibitif, il faut que tout le monde souscrive, les sujets à risque élevé, les malades et les bien-portants. C’est la raison pour laquelle l’Affordable Care Act (Obamacare)avait prévu des pénalités pour ceux qui refuseraient de s’assurer, à l’image de ce que le gouverneur républicain du Massachussetts Mitt Romney, avait réalisé en 2006 (97 % des résidents du Massachussetts sont assurés, soit le taux le plus faible des états des États-Unis). Un deuxième gouverneur, le démocrate Phil Murphy, a imposé cette même obligation dans le New Jersey (voir ici). Au niveau fédéral, ce dispositif essentiel a été abrogé, dans la volonté de saper les bases de l’ACA. Malgré tout, le pourcentage d’Américains non assurés se maintient autour de 9 %, contre 15 % avant l’Obamacare (voir ici).

Selon Paul Krugman, les Républicains américains font tout pour saper les bases de l’Obamacareavant que la population ne s’aperçoive que cette réforme, loin d’entamer les libertés individuelles ou de ne profiter qu’aux minorités, constitue un progrès social pour l’ensemble de la population.

Placard

La directrice du CHU de Grenoble, épinglée dans un récent rapport officiel pour sa « gouvernance », rejoint le ministère (voir ici).

Providence

Les voies de l’État-providence sont-elles impénétrables ? Non, au contraire, si l’on en croit le reportage du New York Times sur l’austérité au Royaume-Uni. Extraits : « For a nation with a storied history of public largess, the protracted campaign of budget cutting, started in 2010 by a government led by the Conservative Party, has delivered a monumental shift in British life. A wave of austerity has yielded a country that has grown accustomed to living with less, even as many measures of social well-being — crime rates, opioid addiction, infant mortality, childhood poverty and homelessness — point to a deteriorating quality of life. »

Qualité, mon œil !

Un discours chirurgical sur la démarche qualité sur le site du Quotidien du médecin. Extrait :« Ce que je voudrais montrer ici c’est que la qualité et la pertinence des pratiques médicales ne peuvent pas s’apprécier au travers de procédures de contrôles stéréotypées. La démarche qualité imposée par la HAS représente une de ces monumentales impasses conceptuelles dans lesquelles notre société aime à se fourvoyer. Simplement parce qu’un soin ce n’est pas un objet. On ne contrôle pas la production de soins comme la production de voitures. La dérive qui veut que la qualité soit toujours quantifiable, est l’image de notre modernité qui prétend tout mesurer. »

Le taux de réadmission est un critère utilisé pour le paiement des soins par Medicare aux États-Unis. Les implications financières sont telles qu’il est intéressant, pour ne pas dire impératif, de manipuler cet indicateur. La technique : faire des séjours d’observation, qui ne sont comptabilisés ni comme des hospitalisations, ni comme des réadmissions. Le tour est joué ! comme le décrit le New England Journal of Medicine.

Le paiement à la performance sur des indicateurs de qualité ne répond pas à toutes ses promesses. Il est mal accepté par les professionnels et surtout repose sur des critères dont la valeur n’est pas établie, comme le montrent Catherine H. MacLean, Eve A. Kerr et Amir Qaseem dans un article du New England Journal of Medicine. Les auteurs demandent un moratoire. Au même moment les autorités sanitaires françaises mettent en avant ce mode de rétribution et s’emballent pour ce qui a échoué ailleurs. Mais, il n’y a rien à faire, la machine est lancée (voir par exemple ici).

Repositionnement

Il en coûte aujourd’hui un milliard de dollars pour mettre sur le marché un nouveau médicament et le processus prend de dix à quinze ans. Le repositionnement de molécules déjà étudiées ou commercialisées dans d’autres indications est un bon moyen d’économiser du temps et de l’argent, mais l’incitation financière est souvent trop faible pour que cette voie de recherche soit pleinement utilisée. L’analyse de données massives de santé va peut-être aussi permettre de rationaliser les recherches dans ce domaine (voir ici l’article du Washington Post et le document publié par les National Academies Press).

Robots paramédicaux

Un informaticien américain a mis au point une infirmière virtuelle, appelée tantôt Louise, tantôt Elizabeth, pour organiser le retour à domicile des patients défavorisés du Boston Medical Center, nous apprend The New Yorker. Extrait : « There was a surprise buried in Bickmore’s experiment: seventy-four per cent of his subjects preferred Louise and Elizabeth to their real-life counterparts. Human health-care providers spend an average of seven minutes with patients at discharge, Bickmore told me, but low-literacy patients need more like an hour. With the virtual nurse, his subjects could proceed at their own pace, digesting the information without the embarrassment of doing so too slowly. As one patient remarked, “Doctors are always in a hurry.” » Cela confirme que le manque de temps est le premier facteur de dégradation des soins.

Sondages

« Globalement, comme tous les Européens, les Français (87 %) sont prêts à donner davantage de moyens à la santé « quitte à devoir réduire les investissements publics dans d’autres domaines », selon le sondage. Et l’amélioration du système de santé doit avant tout passer par l’augmentation des effectifs et du personnel à l’hôpital pour 55 % des concitoyens. »(voir ici)

« La qualité des soins s’est effondrée ces dernières années, estiment 951 médecins dans un récent sondage de 360 médecins pour le site Egora.

Le panel est composé de 35 % de médecins libéraux, 24 % de praticiens hospitaliers et 26 % de jeunes médecins, entre autres.

Interrogés sur leur perception de la qualité générale des soins, les médecins ont accordé une note de 6,31/10 dont 6,23/10 pour les médecins hospitaliers et 6,71/10 pour les étudiants en médecine. Ce sentiment de dégradation s’est installé depuis plusieurs années. 77 % des médecins jugent que la qualité des soins s’est détériorée en cinq ans, dont 47 % des médecins hospitaliers.

Les principaux facteurs cités comme sources de dégradation sont la surcharge de travail et le manque le personnel. Les sondés ont noté 2,13/7 l’impact de ces deux facteurs (plus le score est faible, plus le facteur cité est impactant). Les contraintes comme le tiers payant généralisé imposées par les administrations sont aussi l’une des causes de cet affaissement de la qualité des soins. Le manque de moyens financiers, le bien-être et le moral – en berne – ainsi que le manque de fluidité de l’information entre soignants sont les autres facteurs d’aggravation.

Ces résultats confortent ceux publiés au dernier trimestre 2017 sur la santé des professionnels de santé. 63 % des médecins ressentaient un épuisement à la fois physique et moral. En cause : le comportement des patients et le manque de reconnaissance. »(voir ici)

Trois fois par jour

Le billet de blog désopilant et trop vrai d’une « jeune patiente rangée ». Extrait : « Bon. Vous le savez peut-être : j’ai 30 ans, je suis mariée, je n’ai pas d’enfants. Il faut savoir répondre systématiquement et rapidement à ce mini interrogatoire lors d’une première approche avec tout personnel d’un hôpital, de l’administratif de base au Grand Professeur. C’est souvent : « Nom Prénom Date de naissance ? » – et donc âge – « Marié ? Enfants ? » parfois : « Travail ? » Cet interrogatoire, sans qu’il n’y paraisse, met une pression terrible. Surtout quand il se répète, se répète, se répète. En fait, l’âge c’est OK, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse. En revanche, le mariage, les enfants, et le travail, ouh là là, oui, il y a les bonnes, et les mauvaises réponses. […] Il y avait un externe dans la consultation. Souvent les patients n’aiment pas trop les intrus dans la consultation. Moi J’A-DORE. J’adore parce que le Grand Médecin, s’il travaille bien, explique des trucs à l’externe, et au passage à moi aussi, et je ne suis donc pas l’idiote de service, à qui il faut parler en langage simple = non médical. Alors la Grande Médecin nous expliquait à l’externe et moi plein de trucs intéressants très savants, des examens plus tarabiscotés les uns que les autres, leurs indications, leurs non-indications, leurs contre-indications. L’externe se faisait taper sur les doigts à coups de réglette imaginaire chaque fois qu’il ne savait pas. Il ne révisait pas assez, assénait sa boss. »

Utilité

Plus vous êtes utile à la société, moins vous êtes payé. David Graeber en a fait la démonstration dans son célèbre livre Bullshit Jobs : A Theory 2011). Il la reprend sur LinkedIn. Extrait : « Whatever the reasons—and myself, I believe that class power and class loyalty have a great deal to do with it—what is perhaps most disturbing about the situation is the fact that so many people not only acknowledge the inverse relation but also feel this is how things ought to be. That virtue, as the ancient Stoics used to argue, should be its own reward. »

Le monde universitaire abrite aussi des bullshit jobs(voir l’article de ce même David Graeber sur le site The Chronicle of Higher Education.)

Victimes

La Poste condamnée pour ne pas avoir protégé une salariée contre le harcèlement sexuel et moral de son supérieur (voir ici).

Vidéosurveillance

Une illusion de sécurité, un rendement médiocre (voir ici).

Wisely

Quel impact pour les campagnes Choosing wisely, se demande le JAMA (« Choosing Wisely, a campaign to stimulate conversations between physicians and patients about unnecessary tests, treatments, and procedures, began in the United States in 2012. It was designed as a national campaign about overuse. Yet since its launch, the campaign has spread to more than 20 countries worldwide. Choosing Wisely has been hailed by some as a success, evident in its spread internationally and measured through structure and process indicators, such as recommendations developed, societies engaged, and physicians apprised. The conversation has been stimulated, and now delivery systems and clinical practices are beginning to develop interventions that go beyond conversations and recommendations. The success of the campaign in the next 5 years will be measured by the ongoing engagement of physicians in these interventions and, more importantly, associated outcomes. The effectiveness of quality improvement efforts by these delivery systems will determine how influential campaigns are in actually reducing unnecessary tests and treatments—a true measure of benefit. »

Si cette approche s’internationalise, elle éprouve des difficultés à démarrer en France. Il est vrai que c’est curieusement la FHF qui s’est emparée du sujet, alors qu’il faudrait que ce soit chaque conseil national professionnel qui soit à la manœuvre, quand ces instances en auront les moyens.

XY

C’est en envoyant l’empreinte génétique d’un suspect sur un site de généalogie que la police a pu identifier un serial killer ayant sévi en Californie. Le Washington Post et le Wall Street Journal donnent les détails de l’enquête et les problèmes éthique soulevés par ces sites où est exposé le génome des utilisateurs.

Zinbardo

Dans un ouvrage récent sur les expérimentations conduits par Zinbardo dans les années 1970, Thibault Le Texier montre que comment le résultat recherché a été obtenu frauduleusement (Histoire d’un mensonge. Enquête sur l’expérience de Stanford. Zones). C’est un des travaux en sciences sociales le plus souvent cité. Voir ici le compte rendu du site En attendant Nadeau. Extrait : « Le Texier montre avec une grande finesse comment l’hypothèse de Zimbardo – l’institution prison détermine et impose l’action violente des gardiens – est déjà inscrite dans le protocole de départ ; il révèle ainsi, en croisant les sources, que l’attitude des surveillants a fait l’objet d’instructions en amont, comme, dans une moindre mesure, celle des détenus. Aussi les faux matons n’ont-ils fait qu’appliquer les consignes que l’expérimentateur leur avait données. Plus encore, les règles fixées en amont furent modifiées au fur et à mesure de l’expérience pour qu’on soit sûr de parvenir au résultat escompté : la prison induit des comportements violents et sadiques. Autrement dit, elle est intolérable. »

Amitiés et bon courage.

2 réflexions sur « Puis Mintzberg vint »

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  2. je découvre le blog un 8 février 2022.
    C’est l’illustration que le bruit cache les signaux. ce qui est écrit là reflète ma propre sensibilité et déborde mes connaissances.je ne le découvre qu’avec un retard de plusieurs années
    merci pour cet effort littéraire, qui déborde la médecine, et la psychiatrie

    Joel Ménard

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